Résultats d’une enquête d’opinion sur la sobriété auprès des personnes en situation de pauvreté.
Soyons clairs ! Pas question pour le Pacte civique de minimiser l’urgence qu’appellent le développement de la misère dans notre pays et les difficultés des organisations humanitaires au plus près des personnes en situation de pauvreté, en particulier en matière de secours alimentaire. Cette question doit être prise à bras le corps par les pouvoirs publics dans les plus brefs délais.
Mais, au risque de paraître trop ambitieux, le Pacte civique veut rappeler que les questions du climat et de la biodiversité constituent une incontournable priorité. Comme de nombreuses organisations citoyennes, le Pacte civique entend se mobiliser pour une transition juste. Nous ne pourrons, dans ce cadre, faire l’économie d’une réflexion approfondie sur la sobriété. Le Pacte des solidarités devrait prendre en compte cette dimension : il faut traiter ensemble et non à tour de rôle les questions sociales et les questions écologiques.
Le Pacte civique s’y attelle depuis plusieurs années. Deux sondages récents, réalisés avec l’aide de Viavoice auprès de la population dans son ensemble puis des salariés des entreprises, nous ont montré que la notion de sobriété, aussi complexe et multiforme soit-elle, ne faisait l’objet d’aucun rejet global, bien au contraire.
Certes, la mise en œuvre de la sobriété par l’ensemble du corps social, demandera plus d’efforts aux riches qu’aux pauvres, mais les enjeux pour les plus pauvres sont proportionnellement plus importants. Ceux-ci ont manifestement des choses à dire. Le partage de leurs savoirs aidera à la construction d’une transition juste.
D’où ce troisième sondage, centré spécifiquement sur les personnes en situation de pauvreté1. Que nous dit-il ?
1/ Comme on peut s’y attendre, la population interrogée subit de fortes contraintes dans sa consommation, qui ne peut (pour 55 % des sondés) couvrir tous ses besoins, en particulier en matière d’alimentation, de loisirs/vacances, mais aussi d’eau, d’énergie, d’habillement et de mobilité. La sobriété ne doit pas être l’ennemie du pouvoir d’achat.
2/ un autre enseignement, moins prévisible : la population interrogée se montre très concernée (à 75 %) par le dérèglement climatique et la perte de biodiversité, autant que vis-à-vis des inégalités sociales ; 85 % des personnes pauvres s’attachent à limiter leurs consommations pour des raisons autres que financières : refus du gaspillage et réduction de son empreinte écologique ; ce qui conforte notre option pour une sobriété choisie et non subie.
3/ Les domaines concernés par ces efforts (motivés, rappelons-le, par des raisons autres que financières) sont, dans l’ordre, l’eau et l’énergie, l’alimentation, l’habillement, les appareils électroniques et les loisirs/vacances. Notons que ces champs d’application sont souvent les mêmes que ceux où la consommation est contrainte faute de moyens. Seuls 14 % des sondés affirment ne pas pouvoir faire d’effort supplémentaire.
4/ Dans d’autres domaines, choix ou amélioration d’un logement, culture, numérique et réseaux sociaux, les efforts de sobriété sont plus difficiles et même estimés carrément impossibles.
5/ Les mesures prioritaires préconisées par les personnes interrogées apparaissent particulièrement pertinentes : inclusion de la sobriété dans la pédagogie éducative des écoliers ; aides publiques pour la rénovation des bâtiments ; aides à la construction de logements bon marché à faible empreinte écologique2.
Conclusion : loin d’être indifférentes aux enjeux climatiques et à la valeur sobriété, les personnes pauvres, souvent très contraintes dans leur consommation, déploient des efforts pour éviter le gaspillage et limiter leur empreinte écologique. Il est donc essentiel qu’elles prennent toute leur place dans la réflexion et la préparation des mesures à venir pour accélérer la lutte contre le dérèglement climatique. Elles doivent être pleinement associées à la mise en œuvre généralisée de la sobriété. Celle-ci ne s’établira pas sans leur pleine participation, car rien, en la matière, ne se fera sans justice et sans partage des savoirs.
1 Niveau de revenu inférieur à 60 % du revenu médian, soit environ 1200 euros par mois pour une personne seule.
2 Dans le domaine du logement, il est impossible à un ménage pauvre de déployer sans aide des efforts de sobriété.
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